• Essaouira
  • >
  • Stories
  • >
  • Le Festival Gnaoua trace sa route entre mémoire, traditions et partage

Le Festival Gnaoua trace sa route entre mémoire, traditions et partage

On y était
Alice Joundi
Editor Made in Essaouira
24 juin 2019

De l'édition 2019 du Festival Gnaoua et Musiques du Monde d’Essaouira, on retiendra les instants de grâce et l’indiscutable volonté de rendre hommage au parcours musical de l’événement qui, depuis 22 ans, explore les ressources profondes de la tagnaouite et les marges offertes aux musiques du monde pour mieux s'y mêler, voire s'y retrouver. Retour sur une édition charnière...

Avant que ne soit enfin obtenue cette fin d'année l’inscription par le comité intergouvernemental de l’UNESCO des Gnaoua au patrimoine oral et immatériel de l’humanité, c'est donc une édition charnière pour le Festival Gnaoua et Musiques du Monde qui nous avait été annoncée, et la promesse (tenue) de voyages sur de multiples territoires. Cette reconnaissance à venir, porte les meilleurs auspices d'un accomplissement pour tous ceux qui suivent et organisent le festival depuis 1998 ; ceux qui soutiennent et partagent son engagement pour la mémoire et la préservation des patrimoines artistiques des Gnaoua.

Mais avant cela, le 22ème festival a offert l'occasion de graver quelques souvenirs partagés supplémentaires dans les mémoires des si nombreux festivaliers...

Les Maâlems Gnaoua ont répondu présents, livrant tour à tour, sur toutes les scènes du festival, des prestations aussi rodées qu'emblématiques de la tagnaouite. Moustapha Baqbou, Saïd Oughassal, Omar Hayat, Hassan Boussou, Hamid El Kasri, Abderrazak El Hadir, Mohammed Kouyou, Houssam Gania, Abdelouahed Stitou et tant d'autres grands noms, et héritiers d'un savoir ancestral et précieux, ont fait vibrer les âmes et les corps pendant plus de 3 jours et nuits à Essaouira. 

Photo : Maâlem Mustaphe Baqbou @ Place Moulay Hassan

Fusions et résidences. Ces marques de fabrique du festival ont honoré par leurs métissages la 22ème édition, tirant une nouvelle fois des cordes sensibles et vibrantes entre les Gnaoua d'Afrique et les artistes d'autres continents - Européen, Asiatique et Américain. 

Tour d'horizon du voyage, à travers quelques escales...

Invitée de cette édition, l'Espagne a brillé par les talents du grand Jorge Bardo ou de la troupe flamenca de Maria del Mar Moreno. L'un pionnier aux frontières du jazz et de son art andalous (dont la prestation à Dar Loubane aux côtés du Maâlem Said Oughassal fut à la fois humble et prodigieuse) ; l'autre traversant la Méditerranée pour nous porter l'âme de la ville de Jerez sous les talons de ses danseurs et dans la voix puissante de ses chanteurs.

Photo : Jorge Bardo @ Dar Loubane - Gnaoua 2019

Antilles...

Cuba est venue jusqu'à nous avec le groupe Osain Del Monte. Musiciens et chanteurs ont fait résonné une rumba de feu aux quatre coins de la ville ; de la grande scène place Moulay Hassan au Borj Bab Marrakech, jusqu'à la terrasse de l'Institut Français, dans l'intimité comme le spectaculaire, nul ne résista à l'énergie débordante de ces autres artistes et passeurs d'une tradition familiale...

Photo : Osain del Monte @ Place Moulay Hassan - Gnaoua 2019

Asie. 

À la frontière d'une transe et de la mystique connue des Gnaoua, Susheela Raman a livré avec l'émotion et la poigne d'une femme passionnée, un concert aussi exigeant musicalement (porté par cinq musiciens exceptionnels), que perché haut dans les chakras. L'artiste à la voix puissante et grave, à la lisière entre le jazz et le rock, a navigué entre les langues et les traditions anglaise et tamoule, laissant libre court à sa propre expression de la fusion musicale.

Photo : Susheela Raman @ Place Moulay Hassan - Gnaoua 2019

Ce qui ne se montre pas, car il est intime et précieux.

Les nuits à Dar Loubane, à Dar Souiri et à la Zaouïa des Issaoua sont des espaces de transition entre le réel et la pure émotion. Il est interdit d'y prendre des photos, seuls ceux qui l'on vécu peuvent donc témoigner. On y perd pied, on y décolle, on assiste à la transe pure ou à la rencontre inédite entre des musiciens qui ont décidé, avant d'y entrer, de lâcher prise. Ainsi, ce qu'on en dit doit puiser dans l'instant, le souvenir, bientôt, d'un moment non moins magique. Raconter ces nuits c'est aussi savoir rappeler que les familles comme les mélomanes du monde, les journalistes et les artistes, les passionnés, les connaisseurs, les découvreurs : tout le monde sans distinction, à ces endroits là, à droit à sa part de magie, tant elle déborde et se livre à qui veut bien la prendre.

À n'en pas douter, l'âme brute de ce festival réside dans ces instants précieux, ces moments rares qui ne se montrent pas ; comme c'est le cas des après-midi à l'Arbre à palabres, où les mots et la musique se mêlent pour raconter les histoires de tous, des artistes comme d'un public, émus souvent, heureux chaque fois, réunis dans une rare proximité.

Photo : Public de l'Arbre à Palabres - Gnaoua 2019

Les artistes du groupe touareg Tinariwen, ou bien ceux du groupe mythique jamaïcain Third World, ont témoigné à travers les médias ou sur les réseaux sociaux de leur expérience cette année à Essaouira. Nous les avons également rencontrés. Tous ont célébré la mystique de la ville, de ses ruelles et de son état d'esprit, mais aussi la grande qualité du public, encore une fois venu nombreux, dont l'intensité est selon eux, unique sur le sol africain. 

La part de magie du Festival Gnaoua revient donc aussi à sa ville d'accueil, dont les portes ne sont jamais totalement fermées, et où les vents venus d'ailleurs sont toujours prompts à souffler.

Photo : Tinariwen @ Place Moulay Hassan - Gnaoua 2019

Photo : Third World @ Place Moulay Hassan - Gnaoua 2019

RENDEZ-VOUS pour a 23ème EDITION DU 25 AU 28 JUIN 2020.


Alice Joundi
Editor Made in Essaouira
24 juin 2019

Vous aimerez aussi