Tu seras un rappeur, mon fils

Documentaire
Zara Kadiri
Editor Made in Casablanca
27 avril 2011

Pendant que Simohamed, gardien de voiture à Casa, et son fils Ayoub construisaient leur rêve de rappeurs en devenir, Michelle Medina a laissé trainer sa caméra. Des sessions d'écriture à 4 mains aux studios d’enregistrement de Rabat, son documentaire, All I Wanna Do, nous dresse un portrait de deux générations accrochées à leur passion.

Simohamed est gardien de voiture. Le soir, quand il rentre, il écrit et rap avec son fils Ayoub. De cette histoire vraie, Michelle Medina en a fait un film. Oui, elle, l’américaine bien habillée, s’intéresse au sort des gens de la rue de Casablanca. Loin des clichés, elle parvient à signer un portrait touchant de deux générations brisées qui n’ont comme seule fenêtre sur le monde extérieur que les CD qu’ils achètent, et les textes qu’ils écrivent. Tombée amoureuse du Maroc après avoir rencontré un professeur de Rabat, elle commencera par écrire sur les marocaines dans le cinéma, avant de se lancer dans divers projets. Le dernier en date, All I Wanna Do, est de ces documentaires qui prend plus son sujet par la main que son spectateur. Non, elle n’essayera pas de vous faire pleurer en vous montrant les difficultés de son personnage (je vous laisse la surprise, après dix bonnes minutes de film), elle s’attache simplement, comme nous, à ceux qu’elle a placé derrière la caméra.

Des rues des quartiers populaires aux studios de Radio 2M

« Je voulais faire un documentaire sur le rap au Maroc, et j’ai entendu parler de ce gardien et de son fils. Plus on me parlait d’eux, plus j’avais envie de changer la direction de mon film. » Ce sera un virage à 180 degrés, où Michèle intervient dans l’histoire (façon Michael Moore dépolitisé) pour la faire vivre. Elle amènera ainsi chacun des personnages à la rencontre de son idole (Omar El Sayed de Nass El Ghiwane pour l’un, Don Bigg pour l’autre, « ce n’était pas programmé, mais c’était leur rêve »), les traînera jusqu’au studio d’enregistrement, les suivra déposer leur maquette dans les radios. Le parcours, de A à Z, filmé avec ce qu’il faut de recul. « J’ai grandi dans des circonstances difficiles, je ne peux pas filmer ça si je ne vois pas la beauté dedans », raconte-t-elle, expliquant comment elle a réussi à ne pas tomber dans le cynisme. Des rues des quartiers populaires aux studios de Radio 2M, de petits moments de vie aux écoutes de maquette avec Don Bigg, Michelle signe un documentaire qui n’essaye pas de nous tirer les larmes au pied de biche, préférant se concentrer sur deux destins qui tomberont peut-être dans l’oubli le lendemain de la projection. Mais l’aventure a eu le mérite d’exister, et elle est gravée sur pellicule. Simohamed, philosophe, résume : « Le seul espoir du pauvre, c'est de rêver ».

Texte Mathias Chaillot
Photo DR

Projection de All I Wanna Do, de Michelle Medina, le 28 avril 2011 à 19h30 à la salle de projection du Twin Center.

Zara Kadiri
Editor Made in Casablanca
27 avril 2011

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