Larbi Yacoubi : Commédien et costumier

Portrait
Camille Alary
Editor Made in Tanger
1er octobre 2014

Illustre tangérois, Larbi Yacoubi a marqué le théâtre marocain et participé à l'essor cinématographique au sein du royaume, autant à l’échelle nationale qu' internationale. Les plus grands réalisateurs et metteurs en scènes ont fait appel à ses services.

 

Où êtes-vous né ?

Je suis né en Mars 1930 dans le quartier Mershan, à la maison.

 

Où avez-vous fait vos études ?

J’ai d’abord été à l’école coranique, puis à l’école libre Abdellah Guennoun avant d’intégrer l’école franco-arabe pour ensuite aller au collège Moulay Youssef à Rabat. C’est là où tout a commencé…

 

Pourquoi ce choix de carrière ?

Au sein de ce collège justement, à la fin de mon cursus, j’ai eu un professeur d’art dramatique qui m’a poussé à m’attacher au théâtre. Il me disait que le théâtre, c’est les grandes études.

 

Quels ont été vos débuts ?

J’ai rejoint la troupe de Rabat, La Maamora, à l’époque, elle s’appelait la Scène française et marocaine, composée d’une quarantaine de membres des deux nationalités. Nous jouions les classiques de Molière, Racine et des adaptations en marocain, comme Les Fourberies de Scapin, ainsi que des créations, surtout des comédies, écrites par notre atelier d’auteurs. En 1956, nous avons joué au mythique Théâtre Sarah Bernhardt, à Paris.

 

Comment êtes vous devenu costumier ?

J’avais déjà fait les costumes pour la troupe de théâtre, lorsqu’elle jouait Othello et Hamlet de  Shakespeare. Mais j’ai vraiment embrassé ma carrière de costumier en 1960, lorsque le réalisateur italien Luigi Di Marqi, m’a contacté pour faire les costumes de son film Marie Madeleine, réalisé dans la région de Tiznit et à la Kasbah de Tanger, pour toutes les scènes du palais de Ponce Pilate. Ensuite, j’ai enchaîné pour son second film, Cadavre dans une valise, une histoire de revolver et de poursuite.

Après cela, j’ai été sollicité par une grande dame, Phyllis Dalton, ma prof, dont j’ai tout appris du métier, grâce à elle. J’étais son unique assistant lors du tournage de Lawrence d’Arabie. Nous avions réalisé des centaines de costumes qui demandaient beaucoup de recherches. Par la suite, on a tous deux travaillé sur  Le Message de Moustapha Akkad, un film sur la vie du prophète.



Quelques réalisations étrangères ?

Le Lion du désert, film américano-libyen, réalisé par Moustapha Akkad, sur la vie du nationaliste  Omar Al Mokhtar. Entre temps, j’ai travaillé sur quelques films marocains, comme Le grand Voyage, réalisé par AbdelrahmaneTazi, Les Bras d’Aphrodyte, une production maroco-polonaise. Au début des années 80, j’ai travaillé sur une grande série TV, Marco Paolo, du réalisateur italien Giuliano Montaldo, avec Burt Lancaster dans le rôle du pape. Cela aura duré près de deux ans.

Après, il y a eu La dernière tentation du Christ, de Martin Scorsese. J’ai ensuite été appelé en Espagne pour une série historique. Il y a eu beaucoup d’autres films, marocains, espagnols, allemands, grands ou petits, mais ils ne m’ont pas tellement marqu. Je n’ai arrêté de travailler il n’y a que peu de temps.




Votre dernier film ?

Le dernier film, c’était une production américaine, Les fils du Pharaon, tourné à Ouarzazate.

 

Votre plus grande expérience ?

Un film anglais avec Sean Connery. Il jouait un professeur dans l’antiquité, qui, à chaque fois qu’il préparait un de ses cours, racontait une histoire à son fils, qui rêvait de son père en héros. C’était une belle expérience. Une fois le héros était Agamemnon, une fois Ramsès II, et il fallait concevoir les costumes avec le regard de l’enfant.



Une anecdote à nous raconter ?

Lors du tournage d’une énorme production britanique, Il était une fois la légion, réalisé par Dick Richards, vers Agadir, avec de grands acteurs tels que Gene Hackman, Terence Hill, Catherine Deneuve… On a eu beaucoup de problèmes dans ce film. Des accidents de voitures, et surtout, lors d’une scène hippique, le cheval Gene Hackman a cabré et il a chuté sur une pierre camouflée par le sable. Il s’est cassé quelque chose et est parti près de deux mois aux USA pour se faire soigner. Le tournage a été suspendu et c’est moi et un ami anglais, Brian Holt, qui avons été chargés de garder le staff et le matériel durant tout ce temps.




Dans le théâtre, quels costumes vous ont marqué ?

J’ai réalisé les costumes pour les pièces de théâtre de fin d’années scolaires du Palais Royal, pour les princes et princesses, durant 4 ou 5 ans. J’ai notamment habillé Sa Majesté le Roi Mohammed VI et ses soeurs. La dernière pièce était Cyrano de Bergerac.



Comment expliquer votre réussite ?

En ce qui me concerne, je n’ai pas encore réussi. Je ne me sens toujours pas satisfait. Le cinéma a changé. Aujourd’hui, ce sont les mitrailleuses et les extra-terrestres, ce qui n’est pas du tout mon fort.


 

 

Camille Alary
Editor Made in Tanger
1er octobre 2014

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