Il faut sauver le Soldat Eden !

cinéma
Editor Made in Marrakech
20 février 2013

Des jeunes, des habitants, une association, des engagés, et tout un quartier se mobilisent pour sauver le premier cinéma de Marrakech, le Cinéma Eden, voué à la destruction.

Cette salle obscure anime le quartier de Kennaria depuis 1926. L’association Save cinemas in Morocco avait lancé, en 2010, une campagne pour lever les fonds nécessaires à sa rénovation (3 millions de dirhams). Trois ans plus tard, la façade est tombée, et les promoteurs guettent.

L’Association Save cinemas in Morocco

Une association née en 2007 d’un constat : on est passé, dans les années 80, de 280 salles de cinéma et 40 millions d’entrées, à seulement 35 cinémas (hors multiplexes) aujourd’hui, dans tout le Royaume. Des villes comme Agadir, Ouarzazate, Essaouira, El Jadida, Kénitra, ne possèdent plus de cinéma. C’est la cause du cinéma Eden qui est aujourd’hui le moteur de l’action initiée par des jeunes marocains, encadrée par l’association. Ce cinéma de la médina, laissé à l’abandon, a alors été réinvesti pour y organiser des activités ludiques, des projections et des expositions, à destination des habitants du quartier et de tous ceux qui souhaitaient participer à ce regain de vie de ce lieu mythique de la ville. Combattant ainsi les projets de riads ou de restaurants, qui visaient ce terrain de 2.000 m², idéalement situé près de la Place Jemaa El Fna. Malgré un premier engagement avec la mairie pour préserver son exploitation culturelle, l’association et les habitants ont vu arriver, en pleine nuit, des camions de chantier. La destruction du cinéma Eden a commencé comme un délit inavoué. Force est de constater que ces travaux engagés ne reposent sur aucune autorisation légale. Et c’est bien le problème soulevé aujourd’hui par les membres actifs de Save cinemas in Morocco. Photos, pétition, appels médiatiques, tout est mis en oeuvre pour dénoncer les faits.

La loi protège pourtant les cinémas au Maroc de la destruction et de la transformation. Par manque de mobilisation des instances décideuses, ces salles laissent la place à des projets immobiliers. Le patrimoine culturel marocain est sacrifié pour le profit.

Pourquoi les petites salles ferment ?

C’est bien sûr une question d’argent. Un exploitant indépendant, qui devait s’acquitter d’une TVA de 12,5 %, a vu ce taux monter à 20 % avec la Loi de finances de 2012. Des montants renforcés par le passage au numérique. En effet, malgré un engagement de l’État pour aider le financement de ces nouvelles avancées technologiques (pour un montant de 1 million de dirhams), les frais qui pèsent sur les exploitants indépendants représentent le double de cette aide financière.

Pourquoi préserver les petites salles ?

Comment un pays qui organise de nombreux évènements sur le 7ème art, comme le grand Festival International du Film de Marrakech, pourrait encore être crédible sans salles obscures ? Surtout au vu des chiffres rapportés par le Centre Cinématographique Marocain, CCM, qui dénombrent une trentaine de festivals annuels sur le sujet, vingt-cinq long-métrages produits et une dizaine de films étrangers tournés au Maroc. Cette production place d’ailleurs le Royaume à la seconde place sur le continent, après l’Afrique du Sud.

La moitié des recettes des salles de cinéma au Maroc sont faites par le Mégarama. Ce multiplexe a pourtant deux défauts, diffuser principalement des blockbusters américains et être accessible aux plus aisés, avec des entrées qui varient entre 30 et 60 dirhams.

Mise à jour - Le président fondateur de Save cinemas in Morocco, Tarik Mounim, vient de nous faire savoir que les travaux de destruction ont été arrêtés et que le cinéma Eden semble sauvé. Il planche maintenant sur leur nouveau plan d'action. Affaire à suivre ...

Si vous souhaitez signer la pétition pour préserver ce qu’il reste encore de l’Eden, cliquez ici.

Page Facebook et site web de Save cinemas in Morocco.

Texte - Stéphanie Jacob
Photos - Tarik Mounim 

Editor Made in Marrakech
20 février 2013