BB Cohen, le doyen de l'Ouka
Oukaimeden cache son jeu. Dans la petite station de sports d’hiver qui compte deux résidents à l’année, vit un homme pas comme les autres. A plus de 80 ans, on l’appelle toujours BB Cohen, “on devrait plutôt dire PP Cohen” plaisante t’il. Portrait.
C'est évidemment sa place de petit dernier dans la famille qui lui a valu ce surnom, devenu nom connu puisque cette figure de Ouka a été champion de tennis sous les couleurs du Royaume. Vainqueur avec Pierre Forget (le père de Guy) des championnats d'Afrique du Nord en 1954, BB s'est aussi illustré en deuxième série à Roland Garros, puis dans les tournois internationaux des Iles Canaries. Le tennisman a aussi joué la Coupe Davis en double...
BB Cohen a été numéro deux du tennis marocain en simple et en double dans les années 60. Ce qui lui a valu d'être invité par le roi Hassan II à jouer dans son palais de Rabat. “Hassan II était un passionné de tennis” raconte BB, “c'était aussi un bon joueur, très subtil”.
Première ascension... à pied
C'est adolescent, avant son histoire d'amour avec la raquette, que BB est arrivé pour la première fois à Oukaïmeden. A pied, par la piste d'Asni ! “En 1941, mon lycée nous avait emmené une semaine aux sports d'hiver. Après huit heures de marche, quand j'ai passé le col, crevé, j'ai trouvé l'endroit magique tout de suite. Il n'y avait rien le CAF et un borge militaire. A l'époque Ouka était un refuge.”
Plus tard, BB, toujours sportif, s'installe dans la station le temps des saisons de neige pour y louer des skis. “A l'époque, compte tenu de la route dangereuse, la clientèle qui venait était une clientèle de mordus et de passionnés. Monter à Ouka c'était un peu comme prendre la route du Salaire de la peur”. Devenue à la mode dans les années 70, la station a vu peu à peu vu ralentir son activité au grand dam de BB Cohen “c'est devenu une station pour piétons, c'est très dommage !” Il garde cependant ouverte sa boutique BB SKI en saison.
Une lumière magique
“Ce qui nous attiré ici avec ma femme (Jacqueline Cohen, aujourd'hui disparue - ndlr) c'est cette immense sensation de liberté. Mon épouse écrivait (Madame Cohen a été publiée - ndlr) tous les après-midi dans notre véranda, la lumière ici est fantastique, quel que soit le temps. Elle inspire pour beaucoup de choses. C'est magique de vivre dans un endroit si beau.”
BB est loin d'être associable, il a d'ailleurs plein de copains qui vont et qui viennent à Oukaimeden, son agenda est presque mondain. Pendant les week-ends on le croise à droite et à gauche, avec toujours une belle histoire à raconter. “J'ai pas mal d'amis ici en fait, même si nous sommes peux nombreux à habiter Ouka. Mais quand certains dimanche de neige les cars montent et qu'il y a 3 000 personnes dans la station en une journée, alors que nous ne sommes que deux ou trois à vraiment résider ici, c'est une drôle de sensation !”
Les mains de BB Cohen, magiques au tennis, lui ont aussi offert un style très jazz quand il joue (fort bien) du piano. “Mais je n'ai jamais appris le solfège, ça ne me plaisait pas trop”... le goût de la liberté sans doute. Comme dit la chanson, “Ça veut dire qu'il était libre et heureux d'être là avec nous”... là-haut, dans sa montagne !
Portrait Lila Manel Photos Lila Manel et archives BB Cohen Publié le 31 mars 2011