Abdelhaq El Youssi, artiste globetrotter

Interviews
Dev Web
Editor Made in Marrakech
17 juin 2010

L'équipe du festival Awaln'art a eu un coup de coeur pour Abdelhaq El Youssi, l'un des rares artistes marocains à avoir sillonné les terres avant de trouver son art et son destin. Aujourd'hui entre sculpture et scénographie, il travaille avec une équipe de jeunes marseillais sur les places de Tahanaoute et de Aghmat, à découvrir cette semaine dans le cadre de la 4ème édition des rencontres artistiques en places publiques!

- Prénom, âge, profession ?

Abdelhaq, 32 ans , artiste plasticien sculpteur

- Racontez-nous votre parcours ?

A la fin de l'adolescence j'étais en conflit avec mon père, je suivais des études qui ne me plaisaient pas, j'avais pour seul rêve, d'étudier les arts plastiques. J'ai pris la décision de tout quitter, de prendre la route, d'apprendre différemment. j'ai retrouvé ma liberté, j'étais enfin en accord avec moi même. Tout en me détachant du côté matériel, sans un sou en poche je retrouvais l'essentiel. Ce voyage a duré 10 ans, dont 6 années à sillonner l'Afrique de l'ouest, le Sénégal, le Bénin, le Burkina Faso, le Ghana et le Mali. J'ai rencontré l'art vivant, les différentes humeurs, la vie dans les rues, les couleurs, les matières, la création et la chaleur humaine. L'envie m 'est venue de continuer mon voyage à la recherche d' artistes plasticiens et de sculpteurs. Ils m'ont initié à d'autres formes d'art que je ne connaissais pas, dans diverses disciplines comme la peinture, la sculpture et la scénographie. Par la suite j'ai participé à plusieurs manifestations culturelles comme la biennale de Dakar, les portes ouvertes sur l'île de Gorée...

J'ai décidé de revenir au pays, riche de cette expérience et mon bagage rempli du souvenir de toutes ces rencontres. L'envie de continuer à créer ne m'a plus quittée. J'ai investi un espace pour en faire un atelier "LE SAVO'ART FER" situé au km 35 dans la vallée de l'ourika. Depuis j'ai participé à plusieurs projets et réalisé une sculpture monumentale dans le cadre du premier musée dans la rue de Marrakech, une autre dans la rue de Jura (à maarif, à Casablanca ) et pour la villa des arts de Casablanca à l'occasion du festival l'boulvard. Au mois de septembre je vais suivre une résidence de création dans les locaux de Lézarap'art (Cité des arts de la rue) et rencontrer l'artiste Christophe Blancard qui travaille autour des bases et techniques de la mécanique, du travail du métal et de l'électronique.

Le travail réalisé lors de ma résidence sera exposé dans le cadre du Festival Petit Art Petit organisé par Lézarap'art le 25 septembre 2010 au Parc de l'Oasis (15ème arr.) à Marseille.

- Que représente pour vous le spectacle de rue ?

C'est une action très forte pour la démocratisation de l'art et de la culture, pour ceux qui n'y ont pas accès.

- De quelle manière associez vous l'art à l'humour ?

Très souvent l'art et l'humour ne font qu'un. L'art peut faire rire les gens, leur apporter des émotions et répondre à un manque. La vie sans art est impossible au même degré qu'elle est impossible sans humour.

- Où trouvez vous votre inspiration ?

Partout... là où il fait bon vivre mais aussi là où c'est plus complexe...

- Quel est votre lien avec Awalnart ? Comment les avez-vous rencontré ?

En 2006, j'ai eu l'idée de réaliser une sculpture monumentale pour le rond point situé à l'entrée de Tahanaoute. J'ai décidé d'aller rencontrer le gouverneur de la province, en passant par l'espace associatif j'ai aperçu un groupe de personnes, je me suis arrêté pour leur demander des renseignements. J'ai donc rencontré Khalid Tamer, le directeur artistique du festival. Il a aimé mon idée et m'a soutenu auprès du Gouverneur. Ce projet n'a pas abouti mais le lien avec l'équipe d'Awaln'art s'est tissé et depuis, nous collaborons ensemble.

- Que pensez-vous de ce festival ?

Pendant mon travail de scénographie sur les places , j'ai rencontré les enfants, les jeunes qui apportent de l'aide, qui ont soif d'humour, de spectacle et de joie. Awaln'art ce sont des rencontres différentes et originales à la fois qui renforcent les liens entre les gens, qui tissent des nouvelles relations entre le public et les places vivantes autrefois.

- Que conseillez-vous aux lecteurs de Made in Marrakech d'aller voir pendant le festival ?

Le programme de cette année est très riche et les spectacles sont de qualité. Sur toutes les places nous ferons le fête ! J'ai travaillé avec un groupe d'apprentis de la FAIAR (formation avancée itinérante des arts de la rue) de Marseille pour la réalisation de la scénographie sur les deux places publiques de Tahanoute et Aghmat, prenez ces chemins pour partager ces rencontres avec nous !

- Quelles sont vos expériences à Marrakech ?

J'ai quitté Salé en 1998, pour m'installer avec des amis dans la vielle médina à Derb Dabachi. Pour survivre nous vendions des briquets dans les rues puis des fourneaux dans les villages alentours. Un jour avec un ami on a emprunté des vélos, et pendant un mois nous avons vadrouillé dans la région ; le Haut-Atlas, Ouarzazate, les cascades d'Ouzoud...

- Qu'aimez-vous le plus à Marrakech ?

Le climat, l'architecture et les artistes.

- Qu'aimez-vous le moins à Marrakech ?

Les vélos, les motos et les petites routes bondées de voiture bruyantes. J'aimerais que Marrakech soit une ville sans voiture que l'on découvrirait à pied.

- Avez-vous une anecdote à nous raconter sur la ville ?

Quelques années après mon retour du Sénégal, sur l'avenue Prince, près de la place Jemaa el Fna, j'aperçois une silhouette qui m'était familière, Aïcha, avec qui je parlais en Holof sur l'île de N'gor était là, à vendre des tissus sur une petite roulotte. Marrakech est un carrefour où l'on se croise, on s'y attarde, on s'y attache.

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17 juin 2010