Tu sais que tu es Souiri quand

Appartenance
Nathalie PERTON
Editor Made in Essaouira
31 août 2015

C’est bientôt la rentrée et si pour certains il est temps de regagner l’Europe ou leur pays d’origine, pour d’autres le temps est venu de se re-saisir de notre belle ville et de ce qui fait qu’on l’aime, qu’on y soit nés ou pas. Nombre de philosophes, penseurs, intellectuels se sont interrogés sur la question de l’appartenance ; à un peuple, une culture. Il y a la nationalité que nous donne le sang, celle que nous donne le sol et celle que l’on choisit. Nous nous sommes souiris !

Et nous avons réfléchi à ces petits détails qui font la vie souirie. Ces éléments auxquels on s'est habitués, qu'on a toujours connus et qui marquent la singularité souirie, face à laquelle d'autres sont étonnés, désamparés. Alors pour les souiris de naissance et les souiris d’adoption, nous avions envie de reprendre l'idée de ces fils de réseaux sociaux : "tu sais que tu es marocain quand..." mais pour notre si belle ville. Cela nous a inspiré.

"Tu sais que tu es souiri quand…":

- Le matin quand tu ouvres tes fenêtres : tu vois des palmiers et la transhumance des dromadaires qui s’en vont promener les touristes à la plage.

- Un travail qui ne te permette pas d’aller pêcher, sufer, windsurfer, kiter ou se balader sur la plage chaque semaine est une sorte d’esclavage.

- Une ville comportant des feux tricolores et des stops, pire ; des embouteillages, c’est totalement incongru pour toi !

- A plus de 30 degrés tu te plains d’une insolation

- A moins de 18 tu sors la doudoune Arctique

- Ton accessoire fétiche quelle que soit la période de l’année est un foulard, un chèche

- Tu ne dis jamais : on va à la plage ? Tant il y a de spots de plages sauvages mais : on va à Kaouky ? à Moulay ? à Tagenza ?

- Même un objet à 2 dirhams tu le négocies pour l’obtenir à 1 dirham, question de principe !

- Tu essaies toujours de te soigner de façon traditionnelle avant de prendre un médicament et cours les herboristes pour une plante, une tisane, une potion…

- Ton secret de beauté ne réside pas dans les crèmes des "vues à la télé" car pour toi la meilleure crème cosmétique c'est bien sûr l’huile d’argan.

- Dans ta ville pas de grandes enseignes, tes courses et ton shopping tendance tu le fais "Al Masira".

- Chiner et récupérer est un art de vivre pour toi et tu te vantes des articles que tu as trouvés à la Joutya (souk du dimanche).

- Lors d’un rendez-vous si on t’appelle parce que tu es en retard et que tu es encore en train de prendre ton petit dej’ tu réponds : "ça y est je suis au coin du café, j’arrive !"

- Pour toi tous les taxis du Maroc qui font payer plus de 7 dirhams sont des escrocs !

 - Tu te demandes pourquoi avoir une voiture alors que tu peux faire le tour de ta ville en calèche à 2 dirhams !

- La réussite des industries du jus d’orange industriel est un mystère pour toi qui consomme des jus d’orange pressés à la minute pour quelques dirhams au coin de chaque rue.

- Le seul fast food que tu connaisses c’est celui du monsieur qui vend les pois chiches et les fèves emballés dans un cornet de papier journal.

- Quoi de plus normal pour toi que de voir un orchestre de Gnaoua traditionnel à l’entrée d’un centre commercial ?

- Croiser ta collègue de travail ou ta banquière en pyjama et babouches à l’épicerie est tout à fait banal.

- Le ftour (petit déjeuner idéal) c’est une bonne soupe à l'orge, de l’huile d’olive ou d’argan et du pain ou des œufs au khlee (bœuf séché).

- Tu ne sais pas servir des œufs sans ajouter sur la table non pas de la mayonnaise ou de l’aïoli mais du cumin !

- Tu ne conçois pas de manger du poisson moins de trois fois par semaine.

- A l’approche de l’Aïd el Kabir, un troisième passager sur les mobylettes ne t'étonne pas du tout : il faut bien transporter le mouton !

- Voir 5 chats à tes pieds dans un restaurant est signe de propreté de l’établissement car cela garantit qu’il n’y ait pas de nuisibles !

- Tu t’es surpris à remercier le ciel à chaque fois qu'en voiture tu arrives à destination sain et sauf et tu dis: "Al Ahmdou lillah" même si tu n’es pas musulman.

- Sur le plateau de thé chez toi il y a toujours un verre en plus.

- Tu sais que la statue verte à l’entrée de ta ville n’est pas un mastodonte de l’art contemporain ou une façon de détourner la consommation par un énorme code-barre carré mais l’écriture du sacrée en hommage au Sultan fondateur de la ville : la Barakat Mohammed.

- Pour toi les stars sont Maâlem Mahmoud Gania, Abdelkader Merchane ou Hamid Kasri.

- Il est tout à fait banal que dans le même quartier cohabitent une mosquée, une église, une synagogue.

- Tu n’as ni cinéma ni théâtre dans ta ville mais tu entends ou fais de la musique chaque jour.

- Tu aimes parfois que les touristes fulminent contre les imperfections (supposées) de ta ville en espérant qu’ils n’y restent pas trop !

- Tu rigoles quand on raille ta médina, ta ville, petite car toi tu sais qu'on peut s'y perdre et surtout que cette petite ville au bord de l'océan en a déjà séduit plus d'un, irrévocablement.

- Pour toi le temps est une donnée toute relative, d’ailleurs ton adage favori rétorqué aux occidentaux : "Vous, vous avez les montres, nous on a le temps !"

- Tu aimes passionnément ta ville, ta région et l’Océan qui l’entoure et ne choisirait jamais une autre terre même pour tout l’or du monde.

Car tu es Souiri, tu as choisi Essaouira, sûrement l'une des plus belles villes au monde ! (Yak?)

Texte Nathalie Perton
Photo Alice Joundi 

Nathalie PERTON
Editor Made in Essaouira
31 août 2015