Festival Gnaoua Essaouira Jour # 2: Le "Best Of"

Le meilleur du hier
Alice Joundi
Editor Made in Essaouira
16 mai 2015

Le Festival Gnaoua et Musiques du Monde, vendredi 15 mai à Essaouira : des discussions, des percussions, des passerelles entre les cultures du rock Amazigh et de la grâce !

Le Forum "Femmes d'Afrique" : un exemple d'harmonie des diversités 

Les allocutions en ouverture donnèrent le ton de cette rencontre riche et internationale. Pour les 4 ans du Forum, mené conjointement par le Festival Gnaoua et le Conseil National des Droits de l'Homme (CNDH), Neila Tazi, directrice du festival, rappelle qu'il est une table ronde des genres musicaux et donc un espace légitime pour un forum d'échanges d'idées, avec un thème d'actualité cette année : l'avenir de l'Afrique et la place de la Femme.
André Azoulay rappela quant à lui qu'Essaouira-Mogador est la parabole de l'harmonie des diversités et du devoir de mémoire. Elle est à nouveau, comme à l'époque de son âge d'or, le siège de la coïncidence de l'Afrique nourricière et du reste du monde ; un creuset symbolique de convergence culturelle à une époque où la communauté des nations est plus que jamais gangrénée par "le déni, l'exclusion et le refus de l'autre". Essaouira a toujours été et demeure "un espace de résistance et de métissage, non assimilateur" accueillant "la fusion des musiques et aussi celle de la pensée". Il rappela que "les ambassadeurs de la culture oeuvrent pour la paix et l'échange avec la même efficacité que les politiques."
M. Charif, représentant du CNDH, a souhaité introduire les débats en précisant que la représentation par les médias occidentaux du continent africain est, indiscutablement dégradante : "Nous savons plus de choses sur la manière dont les africains meurent que sur la manière dont ils vivent." Rappelant enfin que "la plus grande force du capital humain de l'Afrique sont les femmes africaines, porteuses de ces valeurs en voix de disparition que sont la gaité et la spontanéité et la lutte contre l'injustice."

"Famille en révolution", "Femmes et créations" : les deux premières tables rondes de ce Forum ont permis de rappeler les enjeux de la modernisation juridique, de l'indispensable lutte contre l'effritement des valeurs familiales, et la menace de la montée des intégrismes en Afrique. Nous avons assisté à des discours spontanés et nourris d'expériences personnelles toutes aussi diverses de femmes fortes, représentant pour chacune d'entre elle les visages différents et complémentaires de l'esprit d'initiative des femmes africaines. Des échanges et des réflexions d'une grande richesse dont il nous sera bien difficile de restituer toute la hauteur et la diversité, mais qui rendait hommage à l'esprit même de cet événement désormais lié au Festival Gnaoua et Musiques du Monde, et à Essaouira.

Arbre à palabres : des débats riches et denses sous l’invisible … 

Ce dernier fut d’abord "Flamboyant", dédié aux îles avec l’ouverture exaltée de Sonny Troupé puis "Baobab" avec Timbuktu… Il nous procura aussi de passionnants échanges concernant la musique classique indienne avec Humayun Khan nous racontant un peu de la quintessence de cet art si complexe des ragas indiens.
Le public est là, fidèle et les questions pertinentes poussant à créer des passerelles entre ces ragas qui sont colorés de même que le sont les mlouks –les génies- du rituel gnaoua…

Des artistes et leur public

Alors que les bruits courraient d'une édition moins fréquentée en raison du changement de mois, le public nombreux et les milliers de personnes présents hier à Essaouira ont fait taire la rumeur. L'édition 2015 a trouvé son audience, et comme à l'accoutumée elle est hétéroclite, familiale et internationale.

Une fusion exquise : Sonny Troupé et le Show man Gnaoua, j’ai nommé Omar Hayat !
Le plus rockeur des Maâlmine partage avec le groupe de Sonny Troupé l'énergie de tous les feux pour une fusion explosive dont les spectateurs se sont délectés, sourires aux lèvres et jambes bondissantes.

Des batteurs et des percussions, du rythme quoi !
Solaires et insulaires celles de Sonny Troupé et de ses acolytes sur scène avec leur énergie positive, leurs sourires et leur gwo ka qui frappent et claquent et rakatakatak, ont accompagné le couchant dans une atmosphère jazzy caribéenne de haut vol…
Expérimentales, les percussions de Jauk le Gnaoui blanc crée un décor auditif de désert féérique aux frontières du blues sur la scène de la plage.
Pro et teintées de highlife pour Tony Allen, qui tomba le chapeau pour le bonnet gnaoui lors d'une fusion avec Maâlem Koyou et sa troupe. Une rencontre dont on gardera en mémoire l'indispensable rencontre entre basse et guembri, et l'envolée d'un saxophone au rythme des crotales, le sourire de master Tony Allen derrière sa batterie.

Exaltantes, enfin celles de Ze Luis Nascimiento accompagnant l’envoûtante princesse rock Amazigh : Hindi Zarah.

Puis de la grâce à la croisée des chemins

Quand on emprunte les ruelles pour accéder à la Zaouia Issaoua, qu’on pénètre là pour écouter Maâlem Allal Soudani et qu’on découvre un parterre rempli d’adeptes, l’encens vous monte au nez, on danse, des femmes dansent, le son est bon et on se dit qu’à ce moment là, on ne voudrait être nulle part ailleurs. Parce qu’on est dans quelque chose de précieux, on sort même de l’émotion que la technologie essaie parfois de voler, on est dans du temps suspendu, dans ce qui fait la raison d’être de ce festival, de l’âme gnaouie, de la tagnaouite à l’état pur. 

Restitution Forum Azhar Joundi
Restitution Arbre à Palabres et concerts Nathalie Perton
Photo Alice Joundi 

Alice Joundi
Editor Made in Essaouira
16 mai 2015