Andalousies Atlantiques à Essaouira : nos 12 bonnes raisons d'y avoir été
Des raisons d'assister au rendez-vous annuel des traditions musicales arabo-andalouses et judéo-marocaines, il y en aurait eu mille ; mais il faut savoir faire le tri. Ils étaient nombreux du 29 au 31 octobre à bord du navire souiri et voguant vers les rivages communs de la Méditerranée et de l'Atlantique. Voici notre sélection d'instants magiques, de coups de coeur et coups d'éclat de cette 12ème édition.
1. Un flamenco audacieux et vibrant livré par la jeune Compania de Danza Flamenca, son duo de danseurs époustouflants et ses incursions jazzy à la flûte traversière. Bluffant.
2. Constater le métissage et la qualité des artistes d'Essaouira dont les jeunes talents tutélaires nous ont offert de très belles prestations sur scène, confortant la vivacité musicale et créative au sein même de la ville hôte du festival.
3. Applaudir le grand Abderrahim Souiri en invité surprise, donnant libre court à son talent inégalable pour partager et célébrer la fête sur scène et avec le public.
4. Découvrir une salle de omnisports transformée comme par magie en salle de spectacle drapée de noir, et sous les lustres de laquelle les 1800 places assises furent prises d'assaut.
5. Entendre le chant et partager la joie de Benjamin Bouzaglo, passé maître dans l'art de faire frémir et chanter une assemblée. Lui-même qui sut dire qu'à Essaouira il réalisa "un rêve d'enfant" en chantant auprès des plus grands maîtres de sa jeunesse.
6. Communiquer aussi bien en hébreux, qu'en arabe, en anglais qu'en français, pourvu que le message soit de paix, et que l'art soit de la fête.
7. Ecouter les voix sublimes de trois grandes chanteuses marocaines réunies sur scène. Zainab Afailal, Nabyla Mann et Sanaa Marahati ont livré leur talent à la salle comble d'un public enchanté.
8. Voir le film "Aïda" en présence de son réalisateur Driss Mrini. Une oeuvre marocaine en sélection officielle du film étranger pour les oscars 2016. Un film dans lequel Essaouira tient place de refuge et d'espace universel et convivial, où la musique arabo-adalouse est un fil tenace entre passé et présent, et toujours porteur d'espoirs.
9. Découvrir la rencontre inédite entre le chanteur souiri Abdelhak el Kaabe et Karinn Helbert, joueuse du très futuriste cristal Bascher. Telle une harpe de verre amplifiée aux sons flutés, cet instrument inattendu a subtilement intégré la musique andalouse devant un public captivé. Ainsi porté par sublime la voix du chanteur, l'ensemble nous a offert une inoubliable sortie des territoires classiques, pour un voyage aux frontières du soufisme.
10. Elles étaient neuf sur la scène de Dar Souiri, les femmes constituant l'ensemble tangérois Arij venu jouer, chanter et nous enchanter à Essaouira. Brisant aussi quelques idées reçues, les chanteuses jouaient aussi le oud, le kanoun, le violon et le piano. Une déclinaison féminine rare et colorée de l'orchestration traditionnelle Al-Andalus venue célébrer une rencontre nord-sud à la marocaine (c'est à dire en fête, youyous et musique !)
11. Quatre voix d'hommes et deux divas étaient réunis sur la grande scène pour le final de cette édition 2015. Polyphonies chaleureuses et festives offertes par la réunion des frères Afriat, Jacob Tordjman, Benjamin Bouzaglo aux côtés de Sanaa Maharati et Zainab Afailal. En ultime prestation ils reprirent d'une même voix le célèbre titre "Il n'y a qu'un seul Dieu" en français et arabe. Que les choses soient claires.
12. Enfin et surtout, renouveler les paroles (et les actes) d'espoir ; constater que ce festival participe aux messages de paix entre communautés du monde, rappelant "l'exception marocaine", et celle d'Essaouira en particulier, de savoir réunir musiciens juifs et musulmans et leurs publics dans un même élan et voeu de partage.
Texte Alice Joundi
Photos Soufiane Bouhali, pour l'Association Essaouira Mogador.