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La Semaine de la Femme avec l’Association Démocratique des Femmes du Maroc

Femmes
Zara Kadiri
Editor Made in Casablanca
5 mars 2012

L'Association Démocratique des Femmes du Maroc est une association créée en 1995. Avec des bureaux à Rabat, Casablanca et Marrakech, l'association milite pour les droits des femmes et l'intégration des politiques publiques. A l'occasion de la journée de la femme, Oumnia Alaoui, militante au sein de l'ADFM, répond à Made in Casablanca.

Made in Casablanca : Pouvez-vous nous parler de l'ADFM ?

Oumnia Alaoui : Nous nous occupons de thématiques qui ont trait aux droits des femmes et à l’intégration de la dimension dans les politiques publiques. Notre méthode de travail consiste en recherche/action, c'est-à-dire que nous faisons des études par rapport à des thèmes accompagnés d’experts en la matière. Par la suite, nous mettons en place un plaidoyer que nous menons auprès des décideur pour la réforme des lois, des dispositions des différents codes (de la famille, de la nationalité, du travail, code pénal, code électoral,..), sur la violence à l’encontre des femmes et sur la levée des réserves émises par l’Etat à la CEDAW  (Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes).

Travailler en réseautage

Nous travaillons aussi en réseautage puisque nous faisons partie de plusieurs réseaux, nationaux, régionaux et internationaux dont  le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’homme (l’ADFM est représentée au sein de deux groupes de travail, le groupe genre et le groupe migration), le collectif Maghreb 95 qui a été à la base de la réforme de la Moudawana, le Printemps de la dignité ( réforme du code pénal), Printemps féministe pour la démocratie et l’Egalité ( réforme constitutionnelle) Egalité sans réserves ( levée des réserves à la Convention sur l’élimination de toutes formes de discriminations à l’égard des femmes), le Mouvement pour le tiers des sièges élus vers la parité devenu le mouvement pour la démocratie paritaire après la réforme de la Constitution…

Made in Casablanca : Pour mieux comprendre votre méthode de travail, parlez nous de votre approche concernant le code de la famille.

Oumnia Alaoui : Au niveau du code de la famille, notre travail a duré de nombreuses années. Il a consisté en campagnes d’informations, témoignages, études, publications, sensibilisation, plaidoyer, soutien et membre au Projet de plan national d’action d’intégration de la femme au développement (1999). Les féministes et les démocrates du Maroc, d’Algérie et de Tunisie se sont également unis pour travailler ensemble au sein du Collectif 95 Maghreb Egalité. Elles ont élaboré un document « les 100 mesures et dispositions pour une codification maghrébine égalitaire du statut personnel» et le « Dalil pour l’égalité dans la famille au Maghreb ». Ce travail a servi également de base au plaidoyer pour la réforme de la Moudouwana. Pour résumer, ce que l’ADFM fait, c’est tout d’abord du travail de terrain, pour mieux cibler, mieux comprendre. Nous étudions le terrain avec des expertes et des experts, les résultats des études nous servent de base pour notre plaidoyer.


Made in Casablanca : En plus de votre travail de recherche/action et de plaidoyer, l’ADFM interagit-elle directement avec les femmes démocrates marocaines ?

Oumnia Alaoui : Il y a un grand travail d’interaction à travers les coalitions avec les autres associations partageant les mêmes visions, les mêmes approches sur la question des droits des femmes. Nous intervenons, intégrons  ou créons des mouvements, coalitions, réseaux.
Nous faisons aussi de la formation et de la sensibilisation. Par exemple le bureau de Casablanca travaille également sur la participation et la représentativité politique des femmes. Nous travaillons au renforcement des capacités des candidates, futures candidates et des femmes élues. Après nos formations, elles ont à leur tour créé des cellules de formation, des espaces de paroles entre elles. Parce qu’il faut le dire, ces femmes sont confrontées à énormément de violences et pas seulement verbale. Nous avons reçu des témoignages de femmes élues assez bouleversants qui nous rappellent cruellement que le paysage politique marocain est à dominance masculine et machiste. Les résistances sont énormes et profondes. Il s’agit de partage de pouvoir politique. Avec une seule femme au gouvernement, c’est révélateur de cet état d’esprit…


Made in Casablanca : Pourriez-vous nous dire un mot sur la place de la femme dans la politique marocaine ?

Oumnia Alaoui : La participation et la représentation des femmes dans la politique sont un un enjeu démocratique pour nous. Les femmes représentent la moitié de la population. Combien sont-elles dans les partis politiques, dans les syndicats, dans les associations ?  Il ne s’agit pas uniquement du nombre de femmes, il s’agit aussi de poser la question de leur place au niveau de la hiérarchie, des postes de décisions.  Prenons le cas des partis politiques : Combien de femmes dans les instances dirigeantes ? Combien de femmes sont à la tête d’un parti? Une seule. Prenons le cas de l’administration publique, le cas du gouvernement ? Combien de femmes ministres (une), secrétaires d’Etat ?

Made in Casablanca : Un dernier mot pour les jeunes femmes d’aujourd’hui et à l’occasion de cette journée de la femme 2012 ?

Oumnia Alaoui : Nous vivons dans une société où les rapports homme-femme sont très complexes.  Il faut savoir que les jeunes femmes d’aujourd’hui se leurrent en pensant que leurs droits sont acquis. Une marche arrière est toujours possible.  Nous en avons eu un aperçu. Sachant que les premiers droits humains à « sauter »  sont ceux des femmes, il faut prendre conscience qu’une relève est fondamentale pour continuer la lutte, il faut être vigilante, lever la barre, se mobiliser pour conserver les acquis et faire avancer la société de manière réellement démocratique où les femmes et les hommes seront traités sur un pied d’égalité.

Interview Zara Kadiri

Photo ADFM

 

 

Zara Kadiri
Editor Made in Casablanca
5 mars 2012