La renaissance des Abattoirs

Art
Zara Kadiri
Editor Made in Casablanca
30 septembre 2010

Pour aboutir à un lieu culturel et artistique d’une telle envergure à Casablanca, ce n’est pas seulement sur l’histoire des abattoirs qu’il faut revenir, mais sur l’histoire d’un quartier, marquée par l’évolution croissante et démesurée d’une ville hors norme.

En 1907, la ville comptait 20,000 habitants. Après la première guerre mondiale, la population atteignait 100,000 casablancais, dont plus d’un tiers étaient d’origines étrangères. Pour répondre à la demande, il fallut construire des abattoirs, dans ce qui devenait la nouvelle zone industrielle.

Dessinés et réalisés par l’architecte parisien Georges-Ernest Desmarest en 1922, ces abattoirs se voulaient modernes et en phase avec leur époque ; surtout vu la démesure du projet et les équipements installés: espace frigorifique, chaudière, traitement des eaux, sectorisation de l’activité. Ils seront réaménagés et agrandis dans les années 50, pour pouvoir être de nouveaux aux normes de l’époque.

Mais outre l’ampleur de ces bâtiments érigés sur 5 hectares, leur style est lui aussi très particulier. Avec des hauts murs de bétons armés, des façades redondantes, des courbes et des lignes simples, des couleurs ternes, c’est la définition d’un style néo-mauresque, que l’on peut qualifier de précurseur du style Art-Déco.

Les décennies ont passées, le bâtiment a vieilli... Jusqu’en 1990, où les abattoirs ne correspondent plus à aucun critère et ne suffisent plus pour répondre à la demande de plusieurs millions d’habitants. Jusqu’au jour, où lors d’un dîner entre amis à la table de l’architecte Rachid Andaloussi en novembre 2000, naît l’idée de la reconversion des anciens abattoirs en un espace culturel et artistique. Rachid Andaloussi soutenu par ses amis, le peintre Mohamed Kacimi, l’architecte Selma Zerhouni et le poète Mustapha Nissabouri, décident de faire parvenir une lettre au roi grâce à Mohamed Kacimi qui devait recevoir un prix des mains de Sa Majesté. L’idée entendue et transmise au souverain, il n’y eut rien à redire, le Roi fut emballé par le projet.

Ces amis décident alors de créer une association nommée "Majazir Addar Al Baidâa", qui aurait pour seul et unique but de donner une nouvelle vie désormais culturelle aux anciens abattoirs. Florence Darsi, attachée artistique, très impliquée dans le projet et l’association, va pousser et développer l’idée jusqu’à la sublimer: “ En faire un espace culturel pluridisciplinaire, qui accueillerait des ateliers de travail pour les artistes, que ce soit des peintres, des troupes de théâtre,…”

En 2003, les anciens abattoirs sont inscrits sur la liste des monuments historiques de Casablanca. Mais ce qui a réellement provoqué l’envol du phoenix, autrement dit la concrétisation de ce projet, c’est la coopération, en 2008, entre Casablanca et Amsterdam. Cette nouvelle alliance relance la théorie du projet...

Quel type de culture doit être représenté ? L’aboutissement de cette idée fut l’ouverture “d’un espace public ouvert à tous, source de création et de diffusion des arts urbains.” En 2009, l’espoir s’empara du coeur de tous ceux qui y ont cru ! En particulier lorsque Casamémoire signa une convention d’un an avec le Conseil de la Ville de Casablanca, pour «permettre l’organisation d’activités culturelles et artistiques de grande envergure comme préfiguration de la vocation future des anciens abattoirs de Casablanca».

A la suite de quoi, 2 millions de dirhams ont été versés pour sécuriser l’endroit, le mettre aux normes, et promouvoir les activités culturelles de l’année. Depuis ce jour, deux évènements artistiques sont organisés chaque mois, certains ont attiré des dizaines de milliers de personnes... Espérons que ce ne soit que le début d’un nouveau souffle pour les Nouveaux Anciens Abattoirs de Casablanca.

Zara Kadiri
Editor Made in Casablanca
30 septembre 2010

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