Faïza Benyoussef Grouz a le mood d'une passionnée

Made in Casablanca : Qu’est-ce qui vous a poussé à ouvrir un café ?

Faiza Benyoussef Grouz : J’ai suivi des études en ingénierie, génie électrique et énergie et pendant mes études, j’ai fait des petits boulots dans la restauration, et j’aimais bien.  J’ai ensuite travaillé dans le secteur de l’énergie pendant 10 ans sur des projets passionnants et au bout de 10 ans, je ne trouvais plus de projets assez passionnants pour me challenger.

Au début, avec mon mari, nous voulions une sorte de café maure dans la ville avec un espace vert puisque Casa manque d’espaces verts mais évidemment, c’était compliqué à trouver dans la ville, ou il fallait sortir de la ville. Finalement, après 2 ans de recherche, nous avons trouvé cet emplacement assez central, dynamique et surtout, non contestable par des habitants (nous ne sommes pas dans un immeuble)

Made in Casablanca : Comment avez-vous appris le métier ?

Faiza Benyoussef Grouz : J’ai pris des cours de cuisine aux saveurs des chefs avec Meryem Cherkaoui, pour comprendre comment ça fonctionne, comprendre comment un chef de cuisine réfléchit, comprendre une cuisine professionnelle est équipée et comment tout ça marche. Je suis moi-même passionnée de pâtisserie, je prenais des cours pour mon propre plaisir. Après j’ai fait les choses de manière académique, j’ai acheté des livres, je me suis beaucoup documentée comme une étudiante pour maîtriser toutes les données et techniques notamment.

Made in Casablanca : En tant que femme, comment vivez-vous dans ce monde d’hommes ?

Faiza Benyoussef Grouz : On ne peut pas nier que dans un monde d’hommes, il faut s’imposer et c’est difficile, ça équivaut dans tous les domaines. C’est un peu plus difficile quand tu es une femme mais femme ou homme, il faut avoir une forte personnalité pour s’imposer et arriver à imposer le respect par le travail. Quand tu mets la main à la pâte et tu montres que tu travailles, tu imposes le respect.

Made in Casablanca : Quelle est ta vision des femmes entrepreneurs à Casablanca ?

Faiza Benyoussef Grouz : Je suis très contente de voir qu’il y a de plus de plus de femmes qui agissent, qui entreprennent des choses et dans tous les domaines. A côté de ça, il y a une régression au niveau politique quand on nous dit qu’il n’y a pas de compétences chez les femmes et qu’on a juste une seule femme ministre, ça me révolte. Alors que les femmes sont plus rigoureuses dans leur travail. On est en régression, la représentabilité n’est pas là et on ne voit que les hommes au-devant de la scène politique.

Made in Casablanca : Dans votre café, beaucoup de jeunes filles viennent seules ou entre elles

Faiza Benyoussef Grouz : Je ne sais pas si vous vous souvenez mais jusque dans les années 80, les cafés étaient réservés aux hommes et nous-même, on contournait les cafés pour ne pas passer devant eux. Aujourd’hui, il y a de plus en plus d’endroits moins envahis par la gent masculine un peu plus « traditionnelle » pour rester correct.  On a plus de filles ici parce qu’elles savent qu’elles ne vont pas être dérangées et que les hommes qui fréquentent ces cafés ne sont pas ceux qui vont les juger.

Made in Casablanca : Pensez-vous que les mentalités aient vraiment changé ?

Faiza Benyoussef Grouz : Honnêtement, je ne pense pas, ce qui a changé c’est une nouvelle génération qui a une nouvelle mentalité, celle qui a été étudier à l’étranger et s’ouvrir l’esprit. Le choc culturel ouvre forcément les esprits, les filles évoluent mais les garçons généralement reprennent leur mentalité d’avant. Alors il faut se forger une personnalité forte pour s’en sortir au milieu de tout ça et même en étant forte, on reste confrontées à des situations difficiles. Beaucoup de jeunes filles éduquées n’arrivent pas à trouver leur équilibre au milieu de ces hommes qui se remettent sous la houlette de leur maman en revenant au pays.

Made in Casablanca : Comment résumer la casablancaise ?

Faiza Benyoussef Grouz : La casablancaise est une femme battante, qui fait énormément de choses, qui passe sa vie à courir entre son travail, sa vie de famille, ses enfants, c’est une grande travailleuse qui n’a pas encore été assez récompensée à sa juste valeur.

Interview Zineb Bennouna

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