L’excellence de l’artisanat marocain : de la corporation à la labellisation.

Cela nous donnait l’occasion de rebondir sur un projet colossal entrepris par le Ministère de l’artisanat afin de garantir l’authenticité et la qualité du travail des artisans, depuis les matières premières jusqu’à l’authentification de produits haut de gamme de l’artisanat marocain. Interview exclusive de Mr Khalid Rahel, chef de la division de la qualité et de la recherche et développement au Ministère de l’artisanat et de l’économie sociale et solidaire : " Le Maroc, nous dit-il, est le Royaume de l’artisanat ; le seul pays au monde qui a autant capitalisé sur son artisanat, nous voulons lui permettre de perdurer tout en étant ouvert au monde, c'est-à-dire qu’il soit encadré, protégé et garant d’une haute qualité."

AUX ORIGINES...

Mr Khahel nous rappelle qu’aux origines ; l’artisanat était régi par des corporations d’artisans, les médinas étaient d’ailleurs structurées en fonction des différents savoir-faire (les tisseurs, les céramistes, les artisans du bois, du cuivre, de l’argent…) Il existait les amine qui validaient la qualité des produits. Mais au-delà du caractère professionnel, ces organisations avaient aussi des fonctions sociales fondamentales ; par exemple si l’artisan venait à mourir, la corporation prenait en charge ses enfants. " Avec l’industrialisation tout ce système s’est peu à peu perdu et la concurrence par le prix, dévastatrice pour l’économie et pour le consommateur a explosé. Ce que nous voulons dorénavant c’est une concurrence par la qualité et nous mettons tout cela en place pour proposer aux artisans une vision d’excellence sur le long terme ".

LES ACTIONS DE CETTE STRATEGIE : 5 LABELS 

Pour être complète, pertinente et faire face à la concurrence internationale ; la qualité devait s'appliquer, dès le départ, à la matière première" c’est pourquoi nous travaillons en amont sur les appuis techniques avec les universités, les laboratoires, les centres scientifiques pour travailler sur la matière première et les techniques de fabrication. Ainsi nous élaborons des normes sur la matière et les techniques : la laine, l’argent, la dinanderie (théières et plateaux…) Il faut réaliser qu’à la fin des années 90 il n’existait aucunes normes."  Et Mr Rahel de préciser :  " Vous vous souvenez des tagines dans lesquels des traces de plomb avaient été retrouvées ? C’est pour que ce genre d’exemples ne se reproduisent jamais !" Cinq labels seront donc appliqués : " le premier concernera la certification et la qualité du produit, le second madmoun garantira la sécurité et la santé du consommateur ; le troisième responsabilisera l’artisan en le poussant à respecter des normes environnementales, sociales (pas de travail des enfants), l’hygiène et les bonnes conditions sanitaires ; au travers de ce label s’inscrit une vision au long terme : diriger l’artisanat vers le commerce équitable et l’économie solidaire. Le quatrième est un label régional ayant pour objectif la promotion de tous les produits d’une région et enfin le cinquième, Qualité Premium, qui a pour ambition de recouvrir l’artisanat d’excellence, le luxe, véritable locomotive des autres labels ! "

LE RAYONNEMENT DE L'ARTISANAT : DU LABEL A LA MARQUE 

Plusieurs régions ont déjà obtenu le label régional, c’est la cas de Marrakech, la région  Souss Massa Draâ vient également dans les premières car elle fait partie "des régions qui ont fait notre tourisme, le développement du Maroc à l’international, nous nous devions de rendre hommage aux artisans qui sont les premiers acteurs de cela.

Et Mr Khalid Rahel d'ajouter que "le label National fédèrera les autres labels et aura pour vocation de promouvoir l’artisan et de le faire évoluer vers la PME puis de plus grandes structures. Les labels sont des marques collectives de certification, ils sont enregistrés à la chambre de l’artisanat mais aussi en propriété industrielle. A terme nous ne voulons plus que nos produits soient vendus sans origine, étiquette, traçabilité. Les marques garantissent cela et l’artisanat devient un produit de promotion. Nous ne protégeons pas uniquement le consommateur, nous protégeons aussi nos artisans car c’est eux qui ont permis le rayonnement de notre culture à travers le monde et malheureusement ils sont aussi plagiés, le label est une façon de les protéger ! "

En savoir plus sur les projets du Ministère de l'Artisanat et de l'Economie Sociale et Solidaire : www.artesnet.gov.ma

Interview Nathalie Perton
Photo DR